
D'après le rapport, citant l'Observatoire national de la délinquance dans les transports, 29% des violences sexistes et sexuelles constatées en 2023 ont été commises après 19 heures, 28% entre midi et 17 heures, puis 20% et 19% entre 7 heures et midi et entre 17 et 19 heures. Le reste a été commis avant 7 heures.
La quasi-totalité des mis en cause (99%) sont des hommes. En 2024, 3.374 victimes de violences sexuelles dans les transports en commun ont été enregistrées, soit 6% de plus qu’en 2023, 9% de plus qu’en 2022 et 86% de plus qu'en 2016, précise l'Observatoire de la mission interministérielle pour la protection des femmes (Miprof). Parmi elles, 44% ont été victimes en Île-de-France. Les femmes restent les principales cibles - elles représentent 91% des victimes selon l’enquête du service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI) citée par l'Observatoire. Deux tiers d'entre elles (75%) ont moins de 30 ans, 36% sont mineures.
Roxana Maracineanu, la secrétaire générale de la Miprof : « Si la plupart des violences faites aux femmes sont commises par des membres de leur entourage proche, il n’en demeure pas moins que l’espace public, et tout particulièrement les réseaux de transports en commun, reste un lieu où les femmes s’exposent aux violences sexistes et sexuelles dès lors qu’elles l’investissent ... Qu’une femme ou une fille modifie ses horaires ou ses trajets par peur d’être agressée doit nous interroger sur la liberté d’accès de toutes les citoyennes au service public des transports »
Manon Marguerit, chercheuse en urbanisme au laboratoire Ville Mobilité Transport de l'Université Gustave-Eiffel : « Les agresseurs auxquels on pense toujours, ce sont les exhibitionnistes et les 'frotteurs'. Il est vrai que les caractéristiques liées à l'espace des transports (enfermement, saturation des corps, impossibilité de fuir du véhicule) peuvent engendrer ces formes de violences sexuelles spécifiques ... D'autres formes de violences comme les regards (qu'ils soient insistants, intrusifs, menaçants, voyeuristes) les insultes sexistes, les attouchements, etc. Considérés trop souvent comme banals, ils peuvent engendrer des traumatismes à la personne qui les subit ... ls choisissent leur pratique en fonction du risque légal encouru, ils agissent souvent aux mêmes heures et aux mêmes endroits. Dans les transports en commun, les flux durant les heures de pointe leur permettent à la fois de jouer sur l'ambiguïté – est-ce un sac ou une main qui m'a touchée ? – mais aussi de disparaître rapidement et facilement »
Raphaël Adamczak, doctorant en psychologie sociale, spécialiste de l'impact des environnements urbains sur les émotions et la peur du crime : « Le harcèlement sexiste ou sexuel a pour but de rappeler que cet espace appartient au groupe masculin. Il ne s'agit pas uniquement d'assouvir des prétendues pulsions mais de véhiculer l'asymétrie des rôles de genre et la domination masculine dans l'espace »
À Paris et en région Île-de-France, une enquête menée par la RATP montre que sept femmes sur 10 ont déjà été victimes de ce type de violences dans les transports franciliens au cours de leur vie. Plus de la moitié (56%) des femmes interrogées déclarent ne pas se sentir rassurées dans les espaces du réseau ferré francilien et 80% confient rester en alerte, selon cette étude ENOV relayée par la Miprof. Seules 7% des victimes recensées par l'étude ont porté plainte auprès d'une gendarmerie ou de la police. Selon les chiffres du ministère de l'Intérieur, sur l'ensemble des victimes de violences sexuelles enregistrées en 2024, 3% l'ont été dans les transports en commun, une proportion stable depuis 2016, selon l'Observatoire national des violences faites aux femmes.
En l'espace de dix ans, la réaction des témoins a évolué avec une plus grande intervention : 23% des victimes déclarent ainsi avoir été aidées par une tierce personne, contre 10% en 2016. Face à l'ampleur du phénomène, certains opérateurs ont mis en place des dispositifs visant à renforcer la sécurité des femmes sur leur réseau, à l'image de descentes à la demande dans les bus.
PHOTO : Photo d'illustration © BOILEAU FRANCK
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